Nous pourrions penser qu’il est utopiste, fou, ou même inutile de vouloir faire l’expérience d’une relation cyberesthésique avec un océan. Mais pourquoi pas ? Pourquoi ne pas nous ouvrir à d’autres sensations, comme nous avons pu le faire avec notre imaginaire, grâce aux films, à la photo ou à la littérature.
Notre expérience @InBedWithOcean est menée sans financement, avec la juste ferveur de passionnés qui souhaitent expérimenter une sensualité augmentée et découvrir les possibilités que nous offrent les nouvelles technologies actuelles.
En France, Yann Minh, Sylvie Mexico, Misha Hess, Pierre Clisson et Philippe d’Albret en 2011 on réalisés un ensemble de représentations artistiques intitulés Cyberesthesies, ayant pour but de transporter les spectateurs dans un voyage immersif, où technologies et corps s’associent pour rapporter aux expérimentateurs des sensations physiques sexuelles, entre autres . Leurs travaux sont disponibles sur leur site internet http://www.cyberesthesie.com/.
D’après Yann Minh, la sexualité cybernétique aura un avenir lorsqu’elle deviendra un prolongement de notre sexualité et que l’évolution de la technologie nous permettra peu à peu de l’oublier pour s’abandonner à nos propres sensations.
La cybersexualité a commencé avec la pornographie qui permettait d’obtenir un plaisir sexuel, voire une relation sexuelle, avec un média, et non avec un partenaire. Puis, peu à peu, l’utilisation de sextoys a pris une place de plus en plus importante au sein de la sexualité individuelle et relationnelle. Aujourd’hui près d’une Française sur deux (49%) a utilisé un sextoy, contre 14% en 2009 et 9% en 2007, et 25% d’entres elles rapportent en utiliser au moins une fois par an. L’étude révèle également que la part de la population en ayant déjà utilisé à deux (45%) est plus élevée que celle en ayant utilisé seule (29%). Enfin si chez les femmes l’expérience en solitaire (40%) est presque aussi fréquente que l’expérience en couple (45%), rares sont les Françaises à n’en avoir utilisé qu’en solo : 6% seulement. La plupart d’entre elles en ont utilisé soit seulement avec un partenaire (10%), soit à la fois en duo et en solo (34%).” (Sondage IFOP/ Dorcelstore.Com, 9 février 2017).
La recherche d’amplification des sensations sexuelles et sensuelles n’est pas nouvelle puisque l’on retrouve des traces de godemichet 28 000 av.J-C !
Historiquement les précurseurs du cybersexe sont le “Réseau” dans les années 1970. Cette communauté de hackers piratent le réseau téléphonique français afin de permettre des communications collectives à vocation sexuelle. En 1975, apparaît le terme dildonic, puis télédildonic, qui renvoi à la technologie à distance permettant de communiquer des sensations par le biais d’un lien data entre les participants. Puis le monde voit apparaître le Minitel, qui servira aux talentueux épistolaires d’outils pour pérenniser leur relation virtuelle, ou transformer celle-ci en rencontre réelle.
En 1987 Mike Saenz réalise sur Macintosh le premier personnage numérique intéractif à vocation sexuelle, la “Macplaymate”. Selon Yann Minh, il s’agit d’une figure caractéristique du cybersexe interactif, puisque cette figurine n’est pas investie par l’homme, il s’agit d’un automate, une ébauche des robots sexuels IA ?
Les années 1985 à 1987 sont marqués par BAckbone cabal et Munchs qui furent les premiers à renommer les arborescences Usenet, réseau de forums inventé en 1979, à travers le monde afin de créer un réseau alternatif permettant d’abriter les sites d’échanges de textes, vidéos, images sexuelles, érotiques de tous genres. Ils ont permis par la même occasion la rencontre de communautés autour de pratiques sexuelles, tel que le bondage avec alt.sex.bondage, à l’origine de rencontre réelles autour de repas informels d’amateurs de BDSM, les “Burger Munch”.
Par la suite, Stahl Stenslie et Kirk Woolford, offrent une démonstration de stimulateurs électriques et mécaniques connectés intitulé CyberSM en 1993 à Paris. Les protagonistes, à l’aide de combinaison “à sensation” composés de biosenseurs sanglés sur les zones érogènes, étaient connectés l’un à l’autre via une simple ligne téléphonique, afin d’expérimenter des sensations par l’un sur l’autre en envoyant des impulsions électriques télécommandé par micro-ordinateurs.
Jusqu’en 1998, s’enchaîne la création de contenu cybersexuel, d’avatars, et Slashdong devient un des sites pionnier dans le détournement des accessoires de jeux vidéo pour la stimulation cybersexuelle. En 2003, SecondLife fait son apparition. Ce monde virtuel devient alors un paradis cybersexuel, et un vecteur de créations artistiques et techniques innovant.
Pour Yann Minh,
“La pratique du cybersexe contemporain, motivée par la quête de rencontres amoureuses, ou hédonistes, réelles ou virtuelles, et du fait de l'interactivité rendue nécessaire par la mise en relation de personnes réelles au travers d'outils de communication sophistiqués, incite ses adeptes à maîtriser des processus de communication complexes, où la part donnée à la créativité est essentielle, (la prose, la narration, le jeu d'acteur, la modélisation 3D, la création infographique....)”.
Il réalise alors avec Silvie Mexico, une performance télédildonique en 2009 à Paris, avec une démonstration d’un harnais cybersexe utilisant des télédildos “ Drmn’Trance vibrator” connectés à SecondLife via le système Xcite Touch, pendant le repas rencontres débats Paris Munch 27.
En 2007, Jennifer LC Chowdhury crée la plateforme Intimate Controllers, pour son projet de thèse à l’université de NewYork. Un ensemble de capteurs directement positionné sur les sous-vêtements des joueurs leur permet d‘avoir une action directe sur le jeu vidéo. Les joueurs sont donc obligés de se toucher l’un l’autre afin de contrôler le jeu.
Depuis 2010, un ensemble d’outils technologiques sont détournés afin d’être utilisés dans la cybersexualité :
La souris haptique Novint Falcon -> restitutions de sensations de rugosité, lourdeur, résistance mécanique, chac, élasticité
La 3rd Space gaming vest -> peut servir à simuler des coups de fouet
Le Mindwire V5 -> un dispositif qui envoie des décharges électriques synchronisées avec les retours de force des jeux vidéos.
Vibromasseurs USB Drmn’Trance Vibrator, interfacés avec le système Xtouch dans SecondLife permettent 4 canaux de stimulations électromécaniques simultanées distinctes, auxquelles il est possible de connecter d’autres accessoires (plug, cockring, dildo)
Le système 3D Vision NVidia, permet de restituer une vision stéréoscopique immersive.
Buttplug Server, permettent de construire de nouveaux programme de codes connectés aux sextoys, Aurélien Fache a construit une plateforme qui permet d’expérimenter différentes manières de contrôler les sextoys via son Buttblug Playground.
En 2013 Durex créé le durex fundawear, sous-vêtement équipé de petits moteurs vibrants pouvant être déclenchés à distance via une application mobile. Si l’idée n’est pas nouvelle, l’entrée des grands groupes dans la cybersexuealité connectée promet des évolutions intéressantes, favorisant leur familiarisation avec le grand public.
De grands projets devraient voir le jour dans les années à venir. C’est par exemple le cas du NooScaphe X de Yann Minh, un système d’immersion virtuelle modulaire, pouvant être utilisé à la fois dans le cadre de pratiques cybersexuelles mais aussi tout simplement pour favoriser l’immersion dans le cyberespace.
En attendant, toutes ces avancées magiques, je retourne à mes inventions papier-carton de Nooscaphe, et je vous invite à lire la bande dessinée ALT-LIFE de Cadène, Falzon et Galopin !
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